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Interview de Nils Mangold : Avec Nilman Bicycle, poser le cadre du vraiment made in France pour les vélos

Interview de Nils Mangold : Avec Nilman Bicycle, poser le cadre du vraiment made in France pour les vélos

Nils, grâce à votre expérience en tant qu'ancien coureur cycliste, quels défis avez-vous rencontrés en fondant une entreprise de fabrication de vélos en carbone entièrement en France ?

Il y a bien sûr des similitudes entre les sports et l’entrepreneuriat, à commencer par la détermination et la discipline.
Le plus gros défi de notre aventure est de reprendre à 0, car les compétences de ce domaine sont devenues extrêmement rares en France, et encore plus chez nous en Alsace. Notre volonté de faire le maximum de choses en interne est un grand challenge, car cela prend beaucoup de temps et d’énergie.
Le premier défi est de réunir les fonds nécessaires, convaincre que la fabrication vraiment française a un sens et un marché. Nous avons rencontré beaucoup de difficultés durant le développement du process. Dans ces moments, comme dans le sport, la gestion de ces « temps faibles » est primordiale pour rebondir, et passer à la prochaine étape, apportant elle-même son lot de défis.

Le vol de vos prototypes a été un coup dur pour Nilman Bicycle. Quelles leçons avez-vous tirées de cet événement imprévu, et comment pensez-vous que cela influencera votre approche future de la sécurité et de l'innovation ?

Le vol n’est jamais une bonne nouvelle. Dans notre cas cela est arrivé au pire moment : au démarrage de notre plan de commercialisation, après 2 ans de développement et donc avec une trésorerie au plus bas. Ces vélos étaient parfaitement roulants, et étaient nos vélos d’exposition et d’essais, ne plus les avoirs retarde tout notre plan de commercialisation.
La première leçon est de toujours prévoir le pire à l’avenir, que tout peut arriver, peu importe où. Nous sécuriserons donc à l’avenir tous nos déplacements au maximum, bien que le risque zéro n’existera jamais.

Votre campagne de financement participatif vise à collecter 30 000 €. En quoi cette approche marque-t-elle une nouvelle direction pour l'entreprise, et comment allez-vous rassurer les contributeurs sur le succès des nouveaux prototypes ?

Le but n’est pas de prendre un virage, mais de passer ce cap et pouvoir absorber le retard de notre plan de commercialisation et la reproduction de nos modèles d’essais.
Notre savoir-faire acquis n’a pas été volé, nous en étions au stade des pré-séries, commercialisés. Nous sommes prêts, il nous faut refaire notre parc de vélos d’essais et redémarrer notre stratégie commerciale.

Le processus mousse N-OSF est une innovation clé de vos modèles. Pouvez-vous nous expliquer en détail ce qui le rend si spécial et comment vous envisagez de continuer à innover dans ce domaine ?

Notre développement nous permet d’utiliser sur certaines pièces du vélo, de la mousse dans notre process de fabrication, celle-ci reste à l’intérieur ensuite. Cette mousse vient laminer le carbone et exercer la pression à l’intérieur du moule. Nous avons une pièce finie en une seule étape, contre 3 dans les process mousse existants, dont la dernière consiste à extraire la mousse à chaud avec de l’acétone sous pression. Ce processus est extrêmement polluant et énergivore. Dans notre process, la mousse dans ces pièces vient les rendre plus robustes, en éliminant presque totalement le risque de délamination du carbone, et améliore le confort en dissipant une partie des vibrations.
Notre but est d’avoir le moins d’impact environnemental possible, tout en proposant des vélos performants et uniques. L’utilisation de fibres recyclées est une piste pour l’avenir, de même que l’utilisation de la fibre de lin pour les accessoires.

La fabrication locale est au cœur de votre projet avec le label "Fabriqué en Alsace". Quels sont les avantages et les défis de maintenir la production exclusivement en France par rapport à une délocalisation partielle ?

La fabrication d’un vélo en carbone est totalement manuelle. Ce n’est pas automatisable. A part la découpe des pièces de carbone par machine, le reste du process est totalement manuel, et un vélo nécessite entre 25 et 30h de main d’œuvre.
En France le coût de cette main d’œuvre est important, sans comparaison avec l’Asie ou même l’Europe de l’Est. Notre stratégie pour pouvoir maintenir des prix cohérents, est de limiter les empilages de marges et donc d’internaliser toutes les phases de fabrication. De la conception à l’assemblage du vélo, tout est fait en interne. C’est ce que nous appelons le « vraiment » made in France. Pour le choix des composants, impossible de rester complètement sur du made in France, néanmoins, nos choix privilégient au maximum les composants fabriqués en France (jantes alu Mach1, Guidons Baramind, Guidoline et accessoires Velox, pneus Hustchinson, etc.).
Nous allons loin dans notre démarche à tous les stades : comme nos moules, que nous concevons nous-mêmes et sont usinés à 10km. Notre logiciel de mise à plat des empiècements de carbone est français, notre peinture est made in France.

Face à un marché compétitif, comment prévoyez-vous de préserver l'avantage de la légèreté et de la performance de vos vélos, notamment avec votre modèle électrique de moins de 12 kg ?

Nous n’avons pas les moyens des grands acteurs du secteur. Mais j’aime dire que quand on n’a pas les moyens on a les idées. Je n’ai aucun doute qu’à l’avenir nous continuerons à trouver les bonnes idées pour se démarquer, proposer des produits originaux et différenciants. Le choix d’utiliser sur tous nos vélos une courroie de transmission et non une chaîne est un exemple. Les vélos Routes et Gravel à courroie n’existent pas (ou presque) en dehors des nôtres.

Enfin, quel message souhaitez-vous faire passer aux amateurs de vélo et aux partisans de la fabrication française qui pourraient soutenir votre campagne et votre vision pour Nilman Bicycle ?

Notre volonté est de créer un maximum valeur en France, et donc des emplois directs ou indirects.
C’est l’avenir de nos emplois et notre PIB, ce n’est pas simplement un drapeau tricolore sur un emballage. Je vois beaucoup trop de flou dans le marché du vélo quant à l’origine réelle des éléments. L’écrasante majorité des vélos dits made in France ont en fait leurs cadres fabriqués ailleurs (principalement en Asie). Pourtant le cadre est la pièce maîtresse du vélo !
Faire le choix de produits vraiment fabriqués en France est le choix de l’avenir, de la préservation de nos savoir-faire, ou comme pour nous de la relocalisation de compétences.
En nous soutenant, vous sauvez 3 emplois aujourd’hui, mais aussi plusieurs dizaines d’emplois à venir.
Pour en savoir plus :

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